Et si l’Afrique devenait l’un des continents pionniers de la révolution numérique ?

Et si la Chine devenait cette première puissance mondiale absolue, à quoi notre monde ressemblerait-il ?

Depuis plusieurs années, malgré une certaine interdépendance, la rivalité entre les Etats-Unis d’Amérique et la République Populaire de Chine ne cesse de s’accroître, et ce, dans tous les domaines.

Mais au cours des prochaines décennies, la Chine peut-elle devenir la première puissance mondiale et dépasser la puissance des Etats-Unis pour la première fois depuis la fin de la seconde guerre mondiale ? Et si la Chine devenait cette première puissance mondiale absolue, à quoi notre monde ressemblerait-il ?

Si les Etats-Unis ont été considérés comme la super-puissance de notre monde à la chute de l’Union des républiques socialistes soviétiques, laissant croire parfois à l’impossibilité pour d’autres Etats de rattraper leur super-puissance, ils font face depuis une vingtaine d’années à la montée en puissance de la Chine. Pourtant, d’après Pierre Tiessen et Régis Soubrouillard dans leur ouvrage « La France made in China », la montée en puissance de la Chine est d’abord vue comme une opportunité par les puissances occidentales, celle-ci produisant pour elles à bas prix, sans pour autant mettre en danger leur suprématie dans certains secteurs, notamment technologiques de pointe. Ce paradoxe a permis à la Chine de se développer, tandis que les puissances occidentales ne savaient pas toujours comment réagir face à la puissance chinoise. D’autant que désormais, la Chine, ayant plus de 3 000 milliards de dollars de réserves de change, renvoie l’image d’une puissance solide, investissant dans des domaines stratégiques tant sur son territoire, comme la défense ou l’innovation technologique, que dans le monde en investissant financièrement en tant que créancier pour certains Etats ou en rachetant des parts de capital de certaines entreprises.

En outre, d’après la Banque mondiale, les PIB totaux des Etats-Unis et de la Chine pourraient se croiser d’ici quelques années, faisant de la Chine la première puissance économique du monde. La Chine est également le premier exportateur mondial de marchandises. En effet, en 2022, les exportations de la Chine représente 2 600 milliards de dollars contre les exportations des Etats-Unis, représentant 1 400 milliards de dollars. La Chine est d’ailleurs considérée comme le premier fournisseur pour une soixantaine de pays dans le monde.

La Chine rivalise avec les Etats-Unis dans le domaine de la Recherche & du développement également. Ainsi, en matière d’innovation, la Chine est devenue le premier déposant mondial de brevets en 2011. Très loin désormais de son image de puissance copiant l’innovation d’autres Etats, la Chine est l’une des plus grandes puissances en termes d’innovation du monde. Selon l’Organisation mondiale de la propriété intellectuelle, la Chine représente à elle seule 43 % de dépôts de brevet dans le monde et dépose deux fois plus de brevets que les Etats-Unis. Elle dépasse également les Etats-Unis en nombre de chercheurs, comptant environ 2 millions de chercheurs chinois contre 1,4 million pour les Etats-Unis. Toutefois, en termes de volume d’investissements en matière de R&D, la Chine reste derrière les Etats-Unis en 2020, avec 563 milliards de dollars investit contre 664 milliards de dollars pour les Etats-Unis. Les Etats-Unis restent aussi devant la Chine concernant la capitalisation boursière, notamment grâce aux GAFAM, bien que l’écart se resserre avec le développement de géants chinois comme Alibaba ou Xiaomi par exemple.

Malgré ces points forts clairement établis, la Chine reste en partie soumise à des défis structurels et conjoncturels qui pourraient la ralentir dans sa conquête de puissance. C’est le cas, par exemple, des inégalités de richesse au sein du pays. Ainsi, en 2021, d’après la Banque mondiale, des régions très riches comme celle de Pékin affichent un PIB par habitant équivalent à celui du Portugal, tandis que d’autres provinces, comme celle de Qinghai, ont un PIB par habitant inférieur à celui de la Namibie. L’effondrement de la natalité pourrait également devenir un problème puisque cela accélère le vieillissement de la population. La Chine, pays le plus peuplé au monde pourrait entamer son déclin démographique dès la moitié des années 2020, réduisant ainsi progressivement la part de la population en âge de travailler.

 

Alors, la Chine peut-elle devenir à l’avenir la première puissance mondiale ? Et quelles en seraient les implications ?

Le Global Center for the Future vous propose de découvrir l’un des scénarios possibles concernant la rivalité sino-américaine dans le but de nourrir notre réflexion commune et d’explorer les pistes d’avenir, parfois potentiellement et volontairement anxiogène.

 

Fin des années 2060, la Chine accueille de nouveau les Jeux Olympiques d’été. Sa diplomatie sportive renforcée ces dernières années, a une nouvelle fois payé. Toutefois, ce n’est pas le seul domaine dans lequel la Chine excelle. En effet, depuis près de dix ans, la puissance chinoise est inégalée faisant d’elle la première puissance mondiale et ce, dans tous les domaines.

Dans les années 2030, les Etats-Unis, déjà en forte compétition avec la puissance chinoise, ont connu une grave crise économique et politique qui les a plongés dans une des périodes d’isolationnisme et de récession les plus importantes et les plus longues de leur Histoire. Si le monde occidental a subi la crise américaine de plein fouet, ce ne fut pas le cas de la Chine qui avait réussi à renforcer son économie, grâce à la mise en place progressive de ses nouvelles routes de la soie, augmentant son influence et ses flux commerciaux, ainsi que son système politique et son influence géopolitique depuis plusieurs années. La faiblesse des Etats-Unis et leurs alliés a donc été perçu comme une opportunité du côté chinois. Sans opposants dignes de ce nom, les nouvelles routes de la soie ont pu être achevées tandis que la Chine prenait le contrôle de certains territoires disputés en mer de Chine. Progressivement Taïwan, privé de son grand protecteur américain, a été réunifié avec Pékin. En 2044, il n’existe plus qu’une seule Chine à la force militaire réputée invincible, très rapidement devenue le gendarme du monde.

En matière économique, la Chine a acquis une très grande indépendance financière tant aux niveaux de la production qu’en termes d’investissement lui permettant par la suite d’investir ou de prêter aux autres Etats au niveau mondial et dans tous les domaines. La Chine s’est ainsi assuré une place de choix dans l’économie mondiale, prenant même parfois en tenaille certaines économies nationales.

Avec la réunification avec Taïwan, en 2044, la Chine est devenue le leader incontesté des nouvelles technologies, du numérique et de l’innovation digitale. D’abord dès les années 2020 avec le développement successif de la 5G, puis de 6G et de la 7G. Ensuite, avec la mainmise sur la plupart des entreprises et industries fabriquant les composants des outils numériques et digitaux au milieu des années 2040 ainsi que leur accès facile aux terres rares du fait des nouvelles routes de la soie, les marques chinoises ont submergé les marchés internationaux de produits high-techs, pour toutes les gammes de prix et de plus en plus innovants. Pour preuve de leur leadership, la plupart des entreprises qui étaient dans la Silicon Valley au début des années 2020 ont petit à petit émigrés vers les grandes métropoles chinoises, Shanghai ayant même crée un immense incubateur de start-ups dans l’une de ces banlieues permettant l’échange des ressources, des matériaux et des locaux entre les différents acteurs.

En outre, à force d’investissements colossaux, l’enseignement supérieur chinois est désormais bien plus réputé et efficient que celui des Etats-Unis pourtant longtemps resté en haut des classements malgré la crise économique et politique interne. Ainsi, dans le classement de Shanghai datant de 2061, pour la première fois depuis sa création, aucune université américaine n’était dans le top 10. A l’inverse, les universités chinoises représentaient la moitié des universités internationales dans le classement, incluant la première et la troisième place. Le nombre de brevet scientifique déposé est également impressionnant, de même que le nombre d’articles scientifiques et universitaires publiés. Dans les années 2060, la réalité est simple : avoir effectué un échange universitaire en Chine ouvre de nombreuses portes. Pour certains postes élevés ou spécifiques à certains domaines comme celui du numérique, il est quasiment indispensable pour espérer avoir un poste dirigeant.

Par ailleurs, idéologiquement, le système chinois d’un parti unique et d’un régime autoritaire mais une économie plutôt libérale s’est développée partout dans le monde à plus ou moins d’égard. Dans tous les cas, la démocratie ainsi que les valeurs de liberté individuelle et de respect des droits humains ont été mises en péril dans le monde en entier. Après des décennies d’affrontements, plus ou moins directs, et de tensions faisant parfois croire à une nouvelle guerre froide entre le vieux géant américain et le jeune colosse chinois, la Chine a su s’imposer. La démocratie a reculé, au profit de régimes plus hybrides ou plus autoritaires. Partout en Occident, après les crises de confiance institutionnelle, les régimes démocratiques ont faibli, ont été remplacés par des régimes différents, parfois très proches de la pensée communiste chinoise prônée par le parti unique. Alors que le bloc de l’Ouest semblait avoir gagné la guerre froide contre l’URSS et le bloc de l’Est, il semblerait cette fois-ci, au XXIè siècle, l’Orient ait supplanté l’Occident.

Enfin, de cette domination à tous points de vue, la planète a été la première victime au début du siècle, avant d’en devenir la principale bénéficiaire. En effet, la Chine premier pollueur mondial au début du siècle a vu sa production de gaz à effets de serre augmenter de manière exponentielle pendant la première moitié de son ascension afin d’être en mesure de combattre les Etats-Unis. A l’effondrement de ces derniers dans les années 2030, et en devenant maître de l’innovation dès la décennie suivante, la Chine a pu inverser sa courbe progressivement. En parallèle, les pays très pollueurs ayant subi une grave crise, ont beaucoup moins consommé de ressources. Cette sobriété forcée, combinée à la puissance de l’innovation chinoise, a permis de faire de très gros progrès sur la protection de l’environnement et de la biodiversité. Insuffisant, toutefois, pour compenser les dérives précédentes. Le monde vit ainsi désormais sous l’influence de la Chine mais également sous la menace d’un effondrement climatique permanent.

Que pensez-vous d’un tel scénario ?